Pourquoi la non-mixité à Vie Féminine ?
Voici une question qui revient souvent, quand on découvre Vie Féminine. Une première réponse à cette question pourrait tenir dans l’identité même du mouvement : Vie Féminine est un mouvement de femmes, c’est-à-dire, par définition, un mouvement rassemblant des femmes. Néanmoins, cela n’élude pas alors une autre question : pourquoi un mouvement de femmes aujourd’hui ? Dans notre société, cette non-mixité fait-elle encore sens à l’heure actuelle ? Comment s’accorde-t-elle avec notre aspiration à une société égalitaire, solidaire et juste ?
Pour Vie Féminine, la non-mixité recouvre deux dimensions : elle s’inscrit dans une perspective tant d’éducation permanente, que féministe. De plus, elle est simultanément un moyen (permettant de faire de l’éducation permanente féministe) et une affirmation politique.
La non-mixité comme moyen
Grâce à la non-mixité, tous nos groupes deviennent potentiellement des lieux d’expression et/ou de prise de conscience à partir de vécus de femmes. La non-mixité facilite l’expression et la communication qui se trouvent alors moins traversées par les rapports de pouvoir patriarcaux. Elle garantit une prise de parole plus libre et l’exposition des faits du point de vue des femmes, sans autocensure. De ce fait, elle permet la mise en commun et le partage de paroles et d’expériences de femmes montrant que les problèmes vécus ne sont pas individuels. Elle assure de travailler à partir des réalités de vie et des expériences des femmes et, en cela rejoint totalement la démarche et les objectifs de l’éducation permanente.
La non-mixité veut prouver que des espaces peuvent exister hors des rapports de domination masculine : elle en ouvre. Bien sûr, cela implique de travailler et veiller à ne pas reproduire les logiques patriarcales qu’on a intégrées. En ouvrant de tels espaces, la non-mixité devient un champ d’expérimentation.
La non-mixité comme affirmation politique
Par la non-mixité, nous affirmons l’existence d’un système de domination au sein duquel les femmes constituent la catégorie dominée. Pointer la non-mixité comme nécessaire, c’est dénoncer la domination des femmes au sein de ce système et affirmer la nécessité d’une autoémancipation « où les opprimées (= les dominées) non seulement luttent pour leur libération mais la définissent » elles-mêmes.
Enfin, cette non-mixité affirme que ce que nous voulons et revendiquons, c’est une société mixte et réellement égalitaire, débarrassée du patriarcat. Elle affirme que les rapports de domination sont loin d’avoir disparu. « Mixité » ne veut pas dire « égalité » et aujourd’hui, nous sommes dans une société mixte et inégalitaire. La mixité masque même bien souvent les situations inégales entre hommes et femmes. Nous souhaitons que la société de demain reflète nos aspirations ! Et, sans des espaces en non-mixité tels que ceux qu’offre Vie Féminine, nos aspirations ne seront pas suffisamment prises en compte.
Mixité et féminisme, inconciliables ?
Si la non-mixité est si importante pour notre mouvement et ses objectifs, cela signifie-t-il que féminisme et mixité seraient inconciliables ? Certainement pas ! Les hommes ont un rôle à jouer dans le féminisme, des hommes sont/peuvent être féministes ou proféministes, à condition qu’ils soient prêts à abandonner leurs privilèges et y travaillent.
Au final, notre action vise aussi à amener femmes et hommes à réfléchir et agir pour une société égalitaire, solidaire et juste. Sans quoi, nous ne ferions pas tout ce qui accompagne notre travail en non-mixité . Mais ce travail que nous faisons alors n’est rendu possible et légitimé que parce que notre travail en non-mixité nous permet de croiser nos expériences de la domination et de définir par ces échanges les changements auxquels nous aspirons vraiment !
Pour Vie Féminine, la non-mixité est donc à la fois :
- un moyen au service de l’éducation permanente féministe. Elle permet à notre mouvement d’être un outil d’émancipation pour les femmes qui y participent ;
- une affirmation politique : la revendication d’une société mixte égalitaire.