Policières en civil pour lutter contre le sexisme, et après ?

Communiqué de presse - 30 mars 2021

Droits des femmes Sexisme


Suivie en rue, insultée à l’arrêt de bus, attouchée dans les transports en commun, etc. 98% des femmes déclarent avoir déjà subi une agression sexiste dans l’espace public [1] . Même si elles sont vivement dénoncées ces dernières années, ces violences quotidiennes perdurent, privant ainsi les femmes d’une occupation sereine et sécurisante de l’espace public.


Ces derniers mois un nouveau dispositif a vu le jour à Liège : des policières habillées en civil se sont promenées dans le centre-ville, les parcs, pour verbaliser les auteurs d’agressions sexistes. Un peu plus d’une trentaine de personnes ont été interpellées.

Si nous encourageons vivement les initiatives visant à lutter contre le sexisme dans l’espace public, nous tenons à rappeler que l’objectif prioritaire doit rester la diminution des violences faites aux femmes. Ce qui implique donc d’agir prioritairement avant la manifestation des violences. Ceci permettrait également de ne pas avoir recours à des « femmes appâts » pour identifier les auteurs.

Par ailleurs, nous tenons aussi à relativiser les effets qu’un tel projet pourrait atteindre en restant isolé. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : « seulement » une trentaine d’interpellations, alors que les agressions sexistes dans l’espace public sont légion. Sans compter que le caractère dissuasif de ces intervenions et leurs effets sur les risques de récidive sont loin d’être garantis en l’absence de mesures complémentaires.

Enfin, il convient également de rester vigilant pour éviter que la lutte contre le sexisme ne serve à accentuer les inégalités et discriminations racistes et sociales, par exemple en opérant davantage ou prioritairement dans certains quartiers. Tous les jours, des actes et paroles nous rappellent que le sexisme « ordinaire » est bien présent dans tous les domaines.

Afin d’agir efficacement contre le sexisme dans l’espace public, il importe d’adopter une approche globale se déclinant à travers différents champs d’action :

Développer et renforcer la prévention, dans tous les secteurs de la société : milieu professionnel, enseignement, etc. En organisant davantage de projets d’information, de sensibilisation et de formations qui s’inscrivent dans le long terme à travers un travail de terrain de longue haleine.

Garantir la protection des victimes en renforçant le travail de réseau, en assurant un accompagnement spécifique à chaque victime et en développant la coopération entre les différents services : médicaux, de justice, associatifs, etc.

Poursuivre les auteurs de violences en facilitant le dépôt de plaintes, en garantissant leur suivi et une responsabilisation des auteurs et en assurant une meilleure communication entre services (Police, Parquet, juges, travailleurs sociaux, …) pour garantir la sécurité des victimes, leur offrir la reconnaissance qu’elles attendent et leur permettre de se reconstruire.

• Tout ceci implique un investissement structurel dans des moyens humains sur le terrain de la prévention, de l’accompagnement et des poursuites, avec du personnel formé à la lecture systémique des violences faites aux femmes afin de garantir des interventions adéquates.

Précisons enfin que ce projet s’inscrit dans la ligne directe de la loi de 2014, loi fédérale « tendant à lutter contre le sexisme dans l’espace public [2] » . Comme nous l’expliquions à l’époque, même si cette loi est importante elle présente des faiblesses notamment concernant sa mise en application. Il importe donc de l’inscrire dans une politique globale et cohérente de lutte contre les violences faites aux femmes et de l’accompagner des moyens adéquats (information, praticabilité, évaluation, etc.) pour qu’elle répondre favorablement aux besoins des victimes.

Il est aujourd’hui essentiel d’agir à tous les niveaux de pouvoirs, de manière concrète et coordonnée pour lutter efficacement contre le sexisme dans l’espace public.

Personnes de contact :

Laetitia Genin
Coordinatrice Nationale
coordinatrice-nationale-lg@viefeminine.be
0498/04 81 41

Laurence Wurtz
Chargée de communication
communication@viefeminine.be



[1Etude de de Vie Féminine : « Le sexisme dans l’espace public, c’est partout, tout le temps et sous toutes les formes », 2017. http://engrenageinfernal.be/wp-content/uploads/2016/10/Etude-Sexisme-web.pdf

[2Voir notre position à ce sujet : https://www.viefeminine.be/demandee-de-longue-date-par-les

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