30%


30% [1], c’est l’écart entre les pensions de retraites des hommes et celles des femmes (1). Les femmes sont surreprésentées parmi les petites pensions, avec tout ce que cela implique en termes de limitation d’autonomie (dépendance vis-à -vis de personnes aux revenus plus importants, notamment vis-à -vis d’un conjoint) et de risque de précarité [2].

30%, un écart encore plus grand que celui qui persiste au niveau des revenus dans la vie active et qui est à l’heure actuelle de 18%. [3]

Comment expliquer cela ?

Le calcul du montant de la pension de retraite s’effectue selon deux éléments principaux :

  • la durée de la carrière (sur base d’un temps plein)
  • les revenus bruts

Mais plusieurs éléments, tant dans la sphère privée que sur le marché de l’emploi, contribuent à réduire la durée de carrière des femmes ainsi que leurs revenus bruts et ont ainsi une incidence négative sur le montant de leur pension.

Sphère privée

  • enfants de la responsabilité de la mère
  • parents « à charge »
  • tâches domestiques relevant de la responsabilité de la femme
  • modèle de l’homme gagnant les revenus du ménage et de la femme s’occupant du foyer ou aux revenus d’appoint
  • femmes se voyant comme mère avant tout
  • femmes moins sûres d’elles et de leurs compétences quant à faire carrière
  • existence de droits dérivés ne favorisant pas le travail (ex : pension de survie, pension à taux ménage...)
  • déficit de services collectifs d’accueil de garde d’enfants
  • déficit de services collectifs pour adultes dépendants
  • ...

Marché de l’emploi

  • discriminations à l’emploi
  • emploi traditionnellement « féminins » moins bien payés
  • emplois où se retrouvent la plupart des femmes = emplois à carrière plane (peu de possibilité de progression hiérarchique)
  • « plafond de verre » et « plancher collant »
  • caractéristiques recherchées sur le marché de l’emploi correspondant à des caractéristiques dites « masculines » (« battant », « compétitif »...)
  • marché actuel favorisant les temps partiels, CDD, statuts précaires...
  • politiques en matière d’emploi favorisant l’écartement partiel, temporaire ou définitif des femmes du marché du travail
  • chômage non indemnisé et statut de cohabitante
  • ...

Conséquences sur la carrière des femmes

  • taux de chômage féminin plus important que celui masculin avec une surreprésentation des femmes dans le chômage non indemnisé
  • emploi de la femme perçu comme secondaire au sein du couple/de la famille
  • bas salaires
  • surreprésentations dans les situations et statuts précaires
  • plus de 80% des emplois à temps partiel
  • interruptions de carrière beaucoup plus fréquentes pour les femmes (pour s’occuper d’un enfant, d’un parent...) et souvent piégeantes tant en termes de pension que de perspectives de carrière
  • ...

Les femmes ont donc des carrières moins complètes, moins fournies et des rémunérations plus faibles.

Le Ministre fédéral des Pensions, Bruno Tobback, a récemment souligné l’existance de cette situation inégalitaire lors de la pension et amorcé une réflexion devant déboucher sur des mesures visant spécifiquement à améliorer les retraites des femmes. [4]

Mais la disparition de cette situation est intrinsèquement liée à une remise en question des représentations et rôles sexués qui modèlent notre société, de la sphère privée aux systèmes institutionnels, dont ceux du travail et des pensions.



[1Les écarts entre hommes et femmes par rapport à leurs pensions de retraite au taux isolé (droit direct pur) étaient de 27,9% pour une personne non mariée et de 33,6% pour une personne mariée en 2003 (données tirées des statistiques annuelles 2003 de l’ONP, citées par Hedwige Peemans-Poullet dans l’analyse n°37/2005 « retraites : à quelle sauce seront mangées les femmes ? » de l’Université des femmes

[2Un autre chiffre significatif est celui des bénéficiaires de la GRAPA : en 2006, 7 bénéficiaires sur 10 de la GRAPA sont des femmes (statistiques reprises sur le site www.femmmeetpension.be du Ministre des pensions, rubrique « stats »)

[3Chiffre tiré de l’analyse du Hoger Instituut Voor de Arbeid, HIVA, menée sur 2006-2007.

[4Une enveloppe de 100 millions d’euros a notamment été prévue pour ces mesures spécifiques.

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